rEGARDS

Metteurs en scène, journalistes, écrivains… À travers leurs regards, l’esprit d’Alphonse Allais poursuit sa route dans la postérité — en sifflotant.

« Avec Allais, la mystification s’élève à la hauteur d’un art...
Il va sans dire que l’édification de ce mental château de cartes exige avant tout une connaissance approfondie de toutes les ressources qu’offre le langage.  »

— André breton

« Enfin il faudrait souligner l’aspect Jules Verne d’Alphonse Allais. À force de prévoir le saugrenu, il a fini par tomber juste. »

— Alexandre Vialatte

« Allais était un être délicieux, apparenté physiquement à Pierrot, de visage long, blême, mélancolique, qu’éclairait un regard rêveur et étonné. Il n’était pas adapté à la vie qui l’égratignait et le déchirait en passant, mais il convertissait son chagrin ou sa nostalgie en ondes oniriques, dont quelques-unes vibreront longtemps dans nos mémoires. »

— Léon Daudet

“ Sa vie n’a pas été heureuse. Peut-être, un jour – plus tard –, on la racontera. Sa femme était jolie, séduisante et fine. Elle lui donna une petite fille qu’il adora – et je l’ai vu, pendant des heures et des heures, penché sur son berceau, la regardant dormir. Il était, dans l’intimité, silencieux, réfléchi, parfois mélancolique et tendre avec une extrême pudeur – tout cela sans cependant jamais cesser d’être en un état constant d’humour, et n’abdiquant en aucune circonstance cette manière de s’exprimer qui n’était véritablement qu’à lui seul. C’était l’esprit le plus indépendant qui fût. Aucune considération ne pouvait intervenir entre le monde et lui. Il était libre, absolument. Sa situation d’écrivain était à peu près nulle. Il n’avait pas de passé, se savait sans avenir, vivait au jour le jour – ou, plus exactement, mourait au jour le jour ! –, ne désirait rien et pouvait hardiment plaisanter les travers de chacun sans qu’il eût à redouter qu’on lui rendît la pareille. Je dois ajouter qu’une délicatesse infinie le préservait de tout excès dans cette voie. Était-il donc invulnérable ? Non, et ses amis auraient pu le taquiner sur la boisson – car hélas ! il buvait. Mais tous ils savaient bien qu’il en mourrait un jour. Il n’en est pas mort tout à fait involontairement, car il lui restait pour toute fortune 17 francs ce jour-là. Je le sais bien, hélas ! puisqu’il m’a été donné d’entrer dans sa chambre une heure ou deux après sa mort.”

- Sacha Guitry

« Alphonse Allais, un Démarque Twain. »

— Pierre Veber

« Il fait penser à quelque Viking, et comme ses ancêtres sur leurs barques remontaient le cours des fleuves, il remontait le courant des préjugés. »

— Maurice Donnay

« Il régnissait en maître absolu le royaume de l’absurde avec les lois de la raison, et, semblable à Spinoza, tenait pour réels tous les possibles.»

— Paul Acker

« Qui est frais ? Allais. »

— Paul Verlaine

« Alphonse Allais a su donner à la mauvaise plaisanterie une forme si virulente qu’elle dégoûta aussi bien les friands d’esprit fin que les amateurs d’épaisse rigolade. Après un pareil exploit, on comprend qu’il demeure un auteur toujours un peu maudit. C’est pourquoi il ne faut pas hésiter à commémorer sa mémoire, avec toute la dignité requise.. »

Raymond Queneau - 1925

Par Man Ray (Emmanuel Radnitzky, dit)
(1890, États-Unis - 1976, France)

« Je regrette que ce genre de blagueur de génie ait à peu près disparu de la surface de Paris. Car ces gens-là n’étaient pas seulement drôles en ce qu’ils écrivaient, mais dans leur comportement (par exemple, les déguisements qu’affectionnait Allais dans le train lorsqu’il commençait le voyage en colonel pour le terminer en vieille fille). »

— Pierre Daninos

« Alphonse Allais est un esprit qui continue à briller dans les conversations des gens d’esprit. Les imbéciles le prennent pour un voyageur de commerce agréable… Ils ne savent pas qu’il avait dans ses valises mille bombes explosives à retardement. »

— Marcel Achard

«Ce qui surprend chez Allais, c’est qu’on n’aperçoit presque jamais le cheminement qui l’a fait arriver à une de ses trouvailles. Ses pensées ne s’enchaînent pas comme celles de tout le monde, selon un protocole banal. »

— Tristan Bernard

« On commence seulement à savoir que cet écrivain (qui ne voulait pas se prendre au sérieux), que ce journaliste (qui refusait les disciplines et les servitudes) a découvert la puissance explosive de l’humour. »

Philippe Soupault

« Homère est plus connu, mais Alphonse Allais est plus moderne.»

— Jules Claretie

« L’humour d’Alphonse Allais était une affirmation rigoureuse, dont il est impossible de mettre en doute le sérieux. Et comme il est également impossible d’y croire, on se trouve dans une étrange position qui vous condamne à l’état de rire… Alphonse Allais choisissait une aventure de la vie moyenne, une aventure très simple, très courante, banale, une aventure pouvant arriver à n’importe qui, et, peu à peu, par développement d’une extraordinaire souplesse, par bons gracieux et accélérés, il lui faisait tout à coup quitter la réalité, comme un aéroplane quitte le sol. On était ainsi conduit, sans savoir par quels mystérieux chemins, à un autre plan de la vie, à une autre dimension. »

— Alfred Capus

« La Belle Époque a connu d’autres hommes d’esprit. Mais aucun d’eux n’a su garder un style aussi net, sans bavures, ni laisser à la postérité une œuvre et un visage aussi personnels : glacé, racé, imperturbable…»

— Anatole Jakovsky

« Allais, celui qui ira. »

— Alfred Jarry

« Grâce à lui, l’hydropathe, le fumiste et le chat noir ne sont pas des langues mortes, ils continuent de vivre dans son œuvre. »

— Jean-Paul Lacroix

« Humour 1900… Alphonse Allais en est le grand-prêtre. Il est le maître incontesté. Il domine son époque de sa haute taille. »

— Jean-Claude Carrière

« Il y a chez Allais, outre le primesaut, l’ingéniosité, la négligence la plus diaboliquement habile, cette façon qu’ont les phrases de retomber sur leurs pieds, un très grand art de prosateur français, de romancier miraculeusement doué, mais qui trouve que les livres, c’est trop long, puisqu’on vous paie, d’ailleurs, à l’article. »

— Michel Chrestien